Bestiaire alien

Zyeledin

Les Zyeledins font partie de ce qu’on appelle dans l’Empire sonaaq les « Apatrides », c’est-à-dire les quelques races intégrées depuis tellement longtemps dans la société sonaaq qu’ils n’ont quasiment plus d’identité propre sur le plan politique. On ignore tout de leur planète d’origine et on ne peut que supposer qu’il s’agissait de la planète-mère des Sonaaqs ou au moins d’une de leurs premières colonies, appartenant tous à un passé mythique dont il ne reste quasiment plus de trace tangible. Il est impossible de déterminer s’ils sont les descendants d’une civilisation détruite jusque dans sa mémoire par ses conquérants ou de simples « animaux domestiques » élevés à la conscience par leurs maîtres.

Emportés de planète en planète par la montée en puissance des Sonaaqs, les Zyeledins ont évolué en une multitude de sous-espèces adaptées à divers climats, bien que la large majorité d’entre eux se porte mieux en milieu humide. Ils possèdent par ailleurs encore quasiment tous une peau étanche et huileuse (comme les cétacés sur Terre), résistante à un niveau relativement important d’acidité mais vulnérable au rayonnement direct d’une étoile, et un système naturel de filtrage de l’air. L’un et l’autre laissent deviner des origines semi-aquatiques ou au moins d’un milieu qui nécessitait une adaptation à des qualités d’air différentes. Cette adaptabilité (en plus de leur très bon taux de natalité) ont fait d’eux des atouts précieux de l’exploration sonaaq et on retrouve des communautés plus ou moins grandes un peu partout dans l’Empire. Ils sont omnivores et peu difficiles à satisfaire en terme de régime alimentaire.

Extrêmement sociables, les Zyeledins vivent en communauté très soudée qu’on appelle « chorale ». Cela vient de ce qui les rend vraiment uniques à travers l’empire : un chant profond, puissant, qui répond et s’accorde avec celui de ses congénères pour former des musiques uniques en leur genre. Ces chants représentent la langue maternelle et le moyen de communication naturel de tous les Zyeledins, ils expriment par là aussi bien des données triviales sur leur état de santé ou leurs besoins primaires que des sentiments complexes ou des réflexions philosophiques. Selon les Zyeledins eux-mêmes c’est un langage qui se ressent plus qu’il ne s’apprend, ses codes s’acquièrent à force d’entraînement mais bien peu d’espèces sont naturellement capables de percevoir l’entièreté de leur spectre vocal. Ce qui est sûr c’est que cette façon de s’exprimer fait partie intégrante de leur équilibre et qu’un Zyeledin isolé ou une chorale à qui on interdit de chanter finit toujours par dépérir. Même les Sonaaqs qui ont mis en veille l’esprit de leur hôte zyeledin doivent s’entourer de serviteurs de la même espèce ou au moins écouter régulièrement des enregistrements de chants existants pour garder le moral. L’identité d’un Zyeledin se compose en général de son nom propre suivi du nom de la chorale à laquelle il appartient – il peut en changer plusieurs fois au cours de sa vie si les circonstances l’y obligent.

D’une espérance de vie assez limitée (les plus vieux individus n’atteignent pas le demi-siècle), les Zyeledins sont en revanche de bons reproducteurs : ils atteignent leur maturité sexuelle vers l’âge de 8 ans et leurs individus femelles peuvent mettre au monde une portée d’un à trois enfants par an jusqu’à leur mort. Les jeunes (très fragiles dans leurs premières années de vie) sont élevés en commun par la chorale toute entière, la notion de famille est vue chez eux au sens large, toujours du point de vue de ceux qui se chargent de l’éducation de l’enfant si les deux parents n’appartiennent pas à la même chorale. Les couples exclusifs sont rares, le mode de vie communautaire encourageant plutôt les relations libres, mais la plupart des chorales respectent ces deux types de fonctionnement. Des problèmes de consanguinité les poussent toutefois à favoriser les relations hors de leur propre chorale à chaque fois que c’est possible.

Longtemps méprisées, traitées tantôt en serviteurs dociles, tantôt en phénomène de foire, les chorales zyeledines sont très divisées sur le mouvement symbionte et leur promesse de liberté. Certaines s’en sont servies comme d’un tremplin pour faire entendre leurs droits et espèrent y gagner une véritable autonomie politique, d’autres n’y voient que de la poudre aux yeux, de belles paroles qui ne changeront globalement rien à leur vie. Une poignée d’entre eux enfin se sont plus ou moins désolidarisés pour proclamer leur propre mouvement (indépendant des Symbiontes) pour la reconnaissance de la particularité des Zyeledins parmi les populations-hôte et la prise en compte de leurs besoins spécifiques. Les Zyeledins qui nouent une union symbionte ont en tout cas tout intérêt à rejoindre une chorale qui approuve ce genre d’association, sans quoi ils s’exposent à des dissonances pour le moins violentes.

Sur Terre les Zyeledins qui ont accompagné les Symbiontes dans leur fuite se sont regroupés en très petites chorales qui ne comptent souvent que deux ou trois individus. Ils ne correspondent que rarement à des chorales familiales préexistantes et se sont donc souvent choisi de nouveaux noms qui font référence au lieu où ils sont installés ou à la personnalité des membres les plus influents de la chorale. La puissance des fréquences de leurs chants a été vite identifiée comme une faille critique dans la sécurité des caches, aussi leur aménage-t-on toujours une salle complètement isolée acoustiquement pour qu’ils puissent s’exprimer librement sans risquer de trahir leur présence. Le reste du temps ils portent des casques pour écouter en sourdine quelques enregistrements à chaque fois qu’ils en sentent le besoin. Leur ouïe très fine est appréciée pour les tâches d’écoute à distance (avec ou sans l’intermédiaire d’un dispositif radio), mais leurs prédispositions pour la natation en font aussi des volontaires de choix pour les missions sous-marines.